
Château Haut-Brisson – Andronik Khachiian
28 février 2025Le parcours artistique d’Andronik Khachiian est guidé par l’improvisation, des émotions profondes et une connexion intense avec le monde qui…
Lire la suiteLe parcours artistique d’Andronik Khachiian est guidé par l’improvisation, des émotions profondes et une connexion intense avec le monde qui l’entoure. Il conçoit sa pratique comme une interaction dynamique entre l’organique et l’intuitif, rejetant toute contrainte dictée par la logique, la symétrie ou les idées préconçues.
Graphiste de formation, Andronik a exploré divers horizons créatifs — du design à l’interprétation théâtrale, en passant par la réalisation de films — chacun ayant contribué à son évolution. Bien qu’il ait déjà pratiqué le dessin par le passé, c’est au début de l’année 2022, lors d’une méditation en pleine jungle mexicaine, que le déclic s’est produit, le poussant à s’investir plus sérieusement dans cette discipline.
Son évolution artistique a été façonnée par un riche héritage familial, qu’il a à la fois intégré et réinterprété à sa manière. Parmi ses ancêtres figurent Ivan Yefimov, un sculpteur russe de renom dont les œuvres furent saluées lors d’expositions internationales à Paris et Bruxelles et Illarion Golitsyn, peintre et graphiste influent du milieu du XXe siècle. Ivan Yefimov fut également un pionnier du théâtre de marionnettes et d’ombres, captivant le public à travers le pays avec ses performances. Illarion, quant à lui, était un véritable expérimentateur : il développa une technique singulière pour travailler l’aquarelle, créa des sculptures qu’il peignait comme des toiles, et mémorisa des milliers de poèmes qu’il récitait avec une virtuosité remarquable. Homme doté d’un humour subtil et d’une approche légère de la vie, Andronik se reconnaît pleinement dans ses qualités. Leur influence se reflète subtilement dans son travail, où conception graphique, performance et art visuel s’entrelacent dans une quête perpétuelle de réinvention.
Pour Khachiian, le dessin est devenu à la fois un refuge et une révélation, un processus qu’il aborde par des éclats d’improvisation totale suivis d´un raffinement minutieux. Sa méthode repose sur une destruction délibérée suivie d’une reconstruction : il altère l’œuvre avec des traits bruts et impulsifs pour ensuite la restaurer avec soin, superposant couche après couche des détails toujours plus précis, comme s’il affinait sans cesse son regard, il explore ainsi de nouvelles profondeurs dans son travail.
Au cœur de son travail réside l’exploration des crises comme catalyseurs de nouveaux sens. Chaque série débute par une rupture dans les relations – qu’il s’agisse de conflits sociétaux, de luttes personnelles ou de tensions historiques – reflétant des moments de bouleversement: des guerres qui divisent les nations et brisent les amitiés, aux cœurs qui se déchirent, en passant par l´évolution des figures héroïques dans la société et le dialogue complexe entre le présent, le passé et la mémoire.
Si les relations humaines sont au cœur de son travail, ses choix artistiques et sa passion pour l’improvisation découlent d´une quête de l’essence naturelle qui l’anime. À traversl’improvisation, son approche artistique tend à apaiser ces tensions, lui permettant ainsi de renouer avec un flux intérieur authentique. Plutôt que de rejeter toute structure, il emprunte un chemin inverse, en privilégiant la fluidité, l’intuition et les formes organiques. Cette démarche se déploie pleinement dans son dernier projet, Death of a Hero (Mort d’un héros), où des paysages abstraits émergent d’une improvisation enrichie de strates texturées. Le projet explore les thèmes de la transformation, de la résilience et de la profondeur émotionnelle, évoluant dans un subtil équilibre entre spontanéité et raffinement.
Un autre tournant dans le parcours d’Andronik est la série Somewhere Over the Rainbow, une réflexion poignante sur le chagrin d’amour et la guérison. Contrairement à ses autres projets, cette série se distingue par une tonalité émotionnelle singulière : malgré un cœur brisé, il ressent une profonde gratitude pour la simple capacité d’éprouver. Même dans les œuvres les plus sombres du début de la série, une joie discrète affleure, se révélant à travers des contrastes subtils et une chaleur sous-jacente. Au fil du projet, les paysages s’adoucissent progressivement, traduisant son cheminement vers le réconfort et l’équilibre.
La vision d’Andronik Khachiian dépasse largement la simple expression personnelle, car il s’engage activement dans le soutien aux artistes émergents. À Mexico, il a fondé Culto Colecta, un projet ayant rassemblé des dizaines de jeunes talents et qui a immédiatement figuré sur la « to-do list » de Vogue Latin America en décembre. Sa prochaine grande aventure est la création d’un pôle artistique à Erevan, en Arménie — terre d’origine de son père —, un espace dédié aux expositions, conférences, programmes éducatifs et résidences artistiques.
Défenseur de l’art participatif, Khachiian conçoit des projets inventifs qui invitent tous les publics — artistes comme non-artistes — à s’impliquer dans le processus créatif. Empty Space, par exemple, pousse les participants à dépasser leur appréhension face à leur propre créativité en leur offrant des outils ludiques, comme une perceuse munie de marqueurs, pour transformer des espaces vides en œuvres collectives.
De même, avec Usual Routes, il encourage chacun à redécouvrir son environnement en capturant des panoramas à l’aide de leur smartphone depuis un véhicule en mouvement, libérant ainsi la créativité du quotidien.
L’expérimentation et la provocation font partie intégrante de l’approche d’Andronik. Il n’hésite pas à repousser les limites, transformant les espaces du quotidien en terrains de jeux artistiques et organisant des expositions insolites, comme celle entièrement consacrée aux portraits dans un vieux bus à Mexico.
L’un de ces gestes spontanés lui a offert une opportunité inattendue : après avoir assisté à sa danse viscérale dans un petit club de jazz mexicain, le propriétaire l’a invité à se produire en direct en tant qu’« instrument humain vibrant ». Transmise par sa mère, la danse est devenue à la fois une métaphore et une méthode dans sa pratique artistique. Khachiyan partage régulièrement sur Instagram des vidéos illustrant ce processus en perpétuel mouvement.
Bien que doté d’un talent exceptionnel, Khachiian rejette le qualificatif de « talentueux », qu’il juge dénué de sens. Pour lui, l’art repose avant tout sur la sincérité — tout le reste, y compris l’originalité, la connexion et l’audace, en découle naturellement. Les commissaires soulignent régulièrement sa capacité à révéler l’essence des choses, une qualité qui définit aussi bien son œuvre que sa vie.
« En laissant un espace blanc autour de mes dessins, j’affirme clairement qu’il ne s’agit pas d’un monde observé à travers une fenêtre ni délimité par le cadre d’une peinture. C’est un monde d’imagination, qui n’existe que dans l’instant où vous le contemplez et en dévoilez les mystères. Dès que vous détournez le regard, il s´évapore, se dissolvant dans le néant. Cet univers est aussi fugace qu’une pensée passagère— une étincelle d’inspiration capable d’illuminer le quotidien, soutenue uniquement par la force de votre attention.
« Cependant, j’attends de mes dessins qu’ils captivent le regard durablement. En plongeant au cœur de détails complexes, je suis convaincu que c’est par cette précision qu’ils inciteront à une observation plus approfondie. »
Son séjour au Château Haut-Brisson fut une expérience profondément enrichissante, lui offrant une « chambre noire » idéale pour l’introspection. Imprégné de la beauté paisible des lieux, il développa sa série Death of a Hero, inspirée par la perte personnelle et es bouleversements sociétaux. Ce fut un tournant dans sa démarche artistique : il délaissa ses marqueurs et aquarelles habituels au profit d’acryliques sur toile.
Lors de cette résidence artistique, il a également saisi l’opportunité de plonger dans l’héritage littéraire de son illustre grand-père, Illarion Golitsyn. Parmi une série d’articles de ce dernier dédiés aux artistes contemporains, il a découvert des idées qui ont profondément résonné en lui — notamment une réflexion de Vladimir Favorsky, peintre graphique soviétique, illustrateur et critique d’art :
« Si vous souhaitez découvrir l’infini dans le fini, créez vos propres mondes. »
De plus, avide de connaissances en tout genre, il a alterné son travail avec des séances d’apprentissage sur l’histoire de l’art et des échanges informels avec les autres résidents du château, parvenant à trouver à chaque rencontre un terrain d’entente – qu’il s’agisse d’un couple suédois d’âge mûr ou de jeunes passionnés d’aventure venus de Nouvelle-Zélande.
Pour l’avenir, Khachiian rêve de réaliser un film à 45 ans, d’écrire un livre à 55 ans et de continuer à explorer la créativité sous une multitude de formes nouvelles.
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